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La taxation des plus-values sur actifs financiers : où en est-on ?

Catégorie

Actualité

Publication

30/09/2025

La taxation des plus-values sur actifs financiers figurait parmi les mesures phares de l’accord de Gouvernement publié le 31 janvier dernier. Sujet de fortes divergences politiques, aucun projet de loi n’a pourtant été déposé au Parlement près de huit mois plus tard. Où en est-on concrètement ? Tentons d’y voir plus clair avec Pauline Maufort, avocate au cabinet Tetra Law et oratrice lors des Cafés-conseils UCM.

Où en est ce projet de taxation des plus-values ?

Plusieurs versions de l’avant-projet de loi ont circulé ces derniers mois, la dernière ayant fuité en juillet. Le texte n’a pas encore été déposé, mais il est suffisamment abouti pour en parler, avec toutes les réserves qui s’imposent puisque l’avis du Conseil d’État n’est pas encore connu et que le travail parlementaire n’a pas débuté.

Quelles en sont les principales mesures ?

Premier point fondamental : ce nouveau régime ne remplacerait pas les systèmes existants de taxation des plus-values à l’impôt des personnes physiques :

• d’une part, la taxation des plus-values sur actions ou autres valeurs de portefeuille lorsqu’elles résultent d’une opération sortant de la gestion normale du patrimoine privé.

• d’autre part, la taxation des plus-values réalisées sur fonds obligataires (la « taxe Reynders »).

La nouvelle taxe viendrait donc s’ajouter, de manière subsidiaire, à ces régimes existants. Par ailleurs, ni la taxe de 2 % sur les primes d’assurance-vie, ni la taxe sur les comptes-titres ne seraient revues à la baisse.

Quels types de plus-values seraient visés ?

Trois grandes catégories de plus-values seraient qualifiées de revenus divers :

a) Les plus-values internes : résultant de cessions d’actions par une personne à une société qu’elle (ou ses proches) contrôle.

b) Les plus-values sur participations substantielles : lorsque le cédant détient au moins 20 % des droits de la société cédée.

c) Les plus-values sur actifs financiers au sens large : actions, obligations, produits d’assurance-vie et de capitalisation, crypto-actifs et devises.

Seraient également visés certains événements assimilés à une cession, tels que la liquidation, en cas de vie, d’un contrat d’assurance ou le transfert de la résidence fiscale à l’étranger, introduisant ainsi un mécanisme d’« exit tax ».

Concrètement, un résident belge qui quitte la Belgique devra donc payer un impôt, même s’il ne vend pas ses actifs et ne réalise donc pas effectivement de plus-value ?

C’est le principe de l’exit tax. La Cour de justice de l’Union européenne a toutefois encadré les conditions de mise en œuvre de ce mécanisme. L’avant-projet en tient compte, ce qui me semble adéquat : le paiement de l’impôt est reporté (automatiquement en cas de départ vers un État coopératif) tant que les actifs ne sont ni vendus ni mis en gage, sous réserve qu’une attestation annuelle soit transmise à l’administration. L’obligation s’éteint si le contribuable revient en Belgique ou si aucun événement imposable n’intervient dans les 24 mois suivant son départ.

Qu’en est-il du coût concret pour les contribuables ?

D’abord, il faut souligner que l’avant-projet prévoit l’immunisation des plus-values historiques, soit celles latentes au 31 décembre 2025.

En ce qui concerne les taux :

• Les plus-values sur actifs financiers (c) seraient taxées à 10 %, avec une exonération annuelle de 10.000 € (montant indexé). Cette exonération peut être partiellement reportée, jusqu’à 15.000 € au maximum sur cinq exercices.

• Les plus-values sur participations substantielles bénéficieraient d’un régime plus favorable et progressif :

o exonération totale sur la première tranche de 1.000.000 € (sur une période glissante de cinq ans),

o puis application de taux progressifs allant de 1,25 % à 10 %.

• Enfin, les plus-values internes, considérées comme abusives, seraient plus lourdement taxées à 33 %.

Y a-t-il encore des zones d’incertitude ?

Oui, plusieurs. Notamment sur la manière de déterminer la base imposable dans certains cas. Le mode de perception et de déclaration reste aussi problématique. Même si le gouvernement souhaite instaurer un prélèvement par voie de précompte, les contribuables devront malgré tout reprendre leurs plus-values dans leur déclaration fiscale pour bénéficier des avantages (exonération, déduction de moins-values, etc.).

Enfin, pour les professionnels, l’avant-projet prévoit des obligations de reporting particulièrement problématiques.

Un dernier mot pour conclure ?

Il est regrettable qu’au lieu de simplifier la fiscalité des plus-values, le Gouvernement choisisse une fois de plus d’ajouter de la complexité. On ne cesse de le marteler mais la justice fiscale ne pourra réellement être atteinte qu’à travers une réforme globale et cohérente de notre système fiscal.